Boire quelques bières, il n'y a rien de mieux pour la santé

Boire quelques bières, il n'y a rien de mieux pour la santé

Nathanaël et Gabriel

J'avais une grosse journée et j'avais prévenu Pablo, mon assistant, qu'on allait devoir rester la journée entière aux docks. Ce qui ne semblait pas vraiment lui poser de problèmes. Je sais qu'il aimait bien être avec moi, mais j'ai l'impression de gâcher son avenir en le gardant avec moi. Il a de quoi devenir un brillant médecin et au lieu de ça, il m'assiste quand je prélève des organes pour le marché noir ou pour le premier type qui a assez d'argent et d'influence pour arriver jusqu'à moi. Dès mon arrivée, je lui annonce la couleur, lui disant que ça allait être une journée longue et pénible. Il haussa les épaules et eut un sourire ironique. Ouais, bon, on en a vu d'autres depuis qu'il bosse avec moi. Dès le premier cadavre, je le laisse faire. C'était une jeune femme, morte Dieu seul sait comment et qui avait échoué sur ma table par miracle. Je voulais voir s'il était capable de se débrouiller seul. Il préleva les deux reins sans problème et je les examinais avant de les mettre dans un caisson prévu à cet effet. Je marquais ce que je devais dessus et on passa à la suite. Il eut un peu plus de mal avec le cœur et je dus lui répéter la marche à suivre. Dans une vie bien lointaine, aujourd'hui, j'ai été médecin. Un brillant chirurgien, mais aujourd'hui, je ne pouvais plus faire mon boulot de manière officielle. Une fois le cœur prélevé, on regarda les autres organes et on décida de les prélever également, ainsi que son sang. Les cadavres défilèrent et les heures aussi. Je ne vis pas la journée passée. J'avais interrogé Pablo sur pas mal de sujet concernant la médecine et il avait bien appris ses leçons. Je savais qu'il allait entrer en internant dans quelques mois et je savais qu'il allait réussir, même si quelque part, cela voulait dire qu'il fallait que je me trouve un nouvel assistant. Je m'étais un peu attaché à ce gosse en fin de compte. Satisfait de la journée et une fois le local rangé et nettoyé et que tous les caissons avaient été pris en charge, on se retrouva dehors. L'air était un peu frais en cette fin de journée, mais quoi de plus normal, on est en automne. Alors que je coinçais une cigarette entre mes lèvres tout en checkant mon téléphone, un sms arriva. Et en voyant le nom de l'expéditeur, un léger sourire se dessina sur mes lèvres. Tiens, il était donc rentré ? Parfait. Je répondis à son message et on se donna rendez-vous dans un bar du centre-ville le soir même pour boire quelques verres ensemble. Pablo s'éloigna de son côté et je me rendis à ma voiture. J'avais besoin de prendre une douche, j'avais l'impression de puer la mort. C'était sans doute le cas quelque part.  Une fois chez moi, je regardais la pile de courrier qui s'accumulait sans y prêter plus attention que ça. Le chat se mit à miauler en réclamant son repas tout en se frottant contre mes jambes pour me faire comprendre qu'il était là. Je lui donnais ce qu'il voulait et lui caressa le dos avant de me diriger vers ma chambre et la salle de bain. Une bonne douche bien chaude me donnera l'impression de ne plus être souillé de morceaux d'os, de chair et de sang. Comme tous les jours. Je ne me plaignais pas, il paraît qu'on a la vie qu'on mérite. Franchement, dans mon cas, ce ne serait pas tout à fait exact, mais qu'importe. Cela fait quelques années maintenant que je suis dans le trafic d'organes, ça paye bien, mes sœurs sont à l'abri de tout, je ne demande rien de plus. Je sors de la douche et m'habille. Chemise blanche, veston bleu, pantalon de la même couleur, chaussures de ville et le tour est joué. Je bois une bière avant de partir, récupère mes clefs et regarde l'heure. Vingt heures. Je serais à l'heure pour une fois, on dirait. J'attrape mes cigarettes, éteins les lumières et ressort de mon appartement. Le chemin vers le centre-ville, je le fais à pied, n'habitant pas très loin. Je savais bien que j'allais boire un peu plus que de raison, comme à chaque fois qu'on traîne ensemble. Lorsque j'arrivais près du lieu de rendez-vous, je regardai par les fenêtres et reconnu mon ami, assis au bar, visiblement en pleine discussion avec une serveuse. Ce qui m'arracha un sourire. Je jetais le mégot et entrai dans le bar. Une légère tape amicale sur l'épaule, je pris place à ses côtés avec un large sourire aux lèvres. J'étais bien content de le voir. " J'espère que je ne te dérange pas..." Je désigne la serveuse d'un signe de la tête. Assez mignonne au passage. " Comment tu va depuis la dernière fois ?" Il ne sait rien de mes activités, heureusement. Pour ma part, je sais qu'il est dans le domaine de l'art et ça me convient tout à fait.

L’Italie était l’un de ses endroits préférés. Dès qu’il avait l’occasion de s’y rendre, il n’hésitait même pas. Il n’avait pas fait ses plus gros coups là-bas, mais cette place restait très chère à son cœur. Son partenaire et seule personne au courant de ses activités illégales (si on excluait la police qui le recherchait sans réellement savoir qui il était) lui avait parlé d’une petite affaire en Italie qui pouvait leur rapporter gros. Pour la première fois de sa vie, le brun avait hésité à accepter ce coup. Il sentait qu’il valait mieux pour lui qu’il reste discret encore un petit moment. Nathanaël n’avait pas la police aux fesses, mais il devait se faire oublier quelques temps afin de pouvoir reprendre les affaires. Son ami n’avait pas insisté, mais à force d’y réfléchir, Naël s’était laissé tenter. Le faussaire avait attrapé l’un de ses faux passeports, il avait fait son petit sac de voyage et avait quitté pour l’Italie pour quelques semaines. Comme à son habitude, c’est sur place qu’il planifia son coup dans l’optique de commettre le vol parfait. L’homme avait de l’expérience et surtout, il était doué. Sa mère serait tellement déçue de le voir « gaspiller » son talent dans la contrefaçon et dans les activités illégales, mais c’était réellement ce qui lui plaisait. De plus, ça rapportait gros. Jamais il n’aurait réussi à avoir des millions dans son compte avec sa petite galerie d’arts. En même temps, Naël ne cherchait pas à la développer. Elle lui servait uniquement de couverture. Même développée, elle ne lui permettrait de vivre cette vie de luxe. Certes, Fowler ne pouvait pas abuser de son argent sans éveiller les soupçons sur lui, mais ça le rassurait de savoir qu’il était quelque part. Si ce n’était pas dans son compte en banque, Naël avait plusieurs planques avec des œuvres d’arts volés qui attendaient uniquement d’être vendues au plus offrant. De l’argent qui dormait.

Son voyage en Europe se passa exactement comme prévu. L’homme se prit un suite d’hôtel, il acheta du matériel afin d’effectuer une contrefaçon parfaite de la statuette à plus de 465 000$ qu’il allait voler, il avait commis l’échange sans se faire voir, il avait fêté sa victoire avec une jolie italienne avant de rentrer à la maison quelques jours plus tard. Bien sûr, il n’avait pas ramené la statuette avec lui. Il l’avait vendu directement. Nathanaël avait réussi à la vendre avant de la posséder et c’est plutôt avec quelques centaines de milliers en plus que le faussaire regagna son grand appartement de Charney. Une fois remis du décalage horaire, Naël contacta Gabriel, un ami de long date, afin de discuter autour d’un verre. Ça faisait longtemps qu’ils ne s’étaient pas vus et ils avaient sûrement quelques petites histoires à se raconter. Certes, Gabriel ne savait rien de la véritable vie de Nathan, mais ça n’empêchait pas les discussions intéressantes.

Comme souvent, Naël arriva le premier au lieu du rendez-vous et en profita pour discuter avec la serveuse en attendant son ami. Ce détail ne sembla pas échapper à ce dernier lorsqu’il pointa finalement le bout de son nez. Nathanaël lui sourit. « Un peu, tu n’es pas aussi joli qu’elle malheureusement. » Son ton était taquin alors qu’il évita Gabriel à prendre place. « Ça va très bien. Je reviens d’un voyage passionnant à Paris. Une nouvelle exposition qui était magnifique. » Mytho. Sauf que le mensonge c’était le résumé de sa vie et tout le monde n’y voyait que du feu. Même lui arrivait à s’auto-croire. « Et toi ? Comment va la vie ? »

Boire quelques bières, il n'y a rien de mieux pour la santé

Nathanaël et Gabriel

Cela faisait quelques années que j'étais dans cette ville, et pourtant, je n'avais que peu d'amis. Oh, des connaissances, j'en avais et surtout dans le milieu dans lequel j'étais. Je n'étais pas le genre d'homme à vouloir être entouré de toute manière. Si j'étais resté chirurgien, pourquoi pas, j'aurais sans doute été obligé, mais à l'heure actuelle, j'étais libre. Libre d'être seul, libre de ne pas vouloir fréquenté trop de gens, libre de faire ce que je voulais. Et très franchement, le trafic m'offrait un cadre de vie que je n'aurais sans doute jamais eu en Angleterre. Il me permettait de vivre confortablement et de faire vivre mes sœurs sans qu'elles n'aient besoin de vraiment travailler. C'était comme un deal entre nous. Elles restaient loin des zones sombres de la ville et je m'occupais du reste. Elles savaient que ce que je faisais n'avait rien de légal, mais on en discutait pas entre nous. Si un jour, il m'arrive quelque chose, je ne veux pas qu'il leur arrive quoi que ce soit. Et même en faisant partit des meilleurs de la ville, de ceux qui ont le plus de boulot, personne n'irait s'imaginer qu'un ancien chirurgien en viendrait à faire ça. Mais, comme tout le monde, il faut bien vivre de quelque chose, n'est-ce pas ? Je soupire et chasse ses idées de ma tête. Ce soir, je veux juste passé une bonne soirée avec un ami. Je l'aimais bien, Nathanaël, on se connaissait depuis quelque temps déjà, et même si je n'avais pas confiance au point de lui dire que j'étais un trafiquant, je l'appréciais beaucoup. De toute manière, il est des choses qu'il n'est pas bon de dire. Je le retrouve au bar en pleine discussion que j'interromps visiblement. Un sourire sur mes lèvres, je lui demande si je ne le dérange pas et sa réponse me fit légèrement rire tandis que je prends place à ses côtés. " Toutes mes excuses, vraiment..." Le ton était légèrement ironique et mon accent anglais encore bien trop prononcé, mais je ne voulais pas renoncer à ça, vu que c'était sans doute la dernière chose qui me rattachait à mon pays natal si cher à mon cœur. " Me voilà rassuré.. Mais, elle est mignonne, c'est vrai." Mon regard traîne quelques secondes sur la serveuse avant de s'en détacher. Même au niveau des femmes, je préférais en rester éloigné. Je ne cherchais pas constamment de présence féminine à mes côtés comme certains de mon milieu. J'étais bien trop occupé entre mon boulot et mes soeurs pour avoir le temps, et l'envie d'avoir une vie sentimental stable. J'en avais une en Angleterre, mais après mon renvoi, tout était parti en sucette, puis ma mère était morte et nous avions quitté le pays pour arrivée ici. Et puis, il n'y en avait aucune pour le moment qui avait réellement retenu mon attention. Bon, il y avait bien Angéla, la petite policière sous couverture, mais c'était compliqué. Il m'expliqua ensuite qu'il revenait de Paris, où il avait été à une exposition bien sympathique. J'allais souvent à Paris quand j'étais petit, quand mon père était encore en vie.  " Paris est une très belle ville. J'suis content que ça se soit bien passé pour toi ! " Puis, il me retourna la question. Que dire ? Que je passe mon temps à découper des cadavres, à prélever les organes et le sang pour le revendre au plus offrant ? Non, bien sûr que non. J'inspire légèrement avant de répondre. " La vie se passe pas trop mal, je bosse pas mal en ce moment. Les affaires marchent comme on dit et c'est le plus important, non ?" Je souris tout en le regardant, tandis que la serveuse revint vers nous.  " Une bière pour moi. Tu bois quoi ? Oh et je paye, la première tournée." Rien ne m'y obligeait, mais je le faisais avec plaisir. Cela me permettait de décompresser après les derniers jours passés à travailler comme un dingue. Et puis j'avais vraiment besoin de me changer les idées, à ce qu'il paraît, je ne prends pas assez de temps pour moi. Possible, mais je ne suis pas sûr de savoir comment on fait. N'ayant jamais vraiment fait passer ma personne avant les autres. Il faudrait que je réfléchisse à ce point un jour. J'attrape ma bière et trinque avec mon ami. " A la tienne et à cette réussite qui nous sourit." La seule question qui se pose, c'est combien de temps encore, cette chance va nous sourire. Pour le moment, elle est de mon côté, ayant passé un deal avec un flic pour passé en travers des mailles du filet.

Nathanaël était un charmeur dans l’âme. Il l’avait toujours été. Son regard bleu perçant et son sourire Colgate aidait énormément sa cause. Lorsqu’il était arrivé dans ce café et qu’il avait vu que son ami n’était pas encore présent, le brun avait jeté son dévolu sur la magnifique serveuse. Son but ? Obtenir son numéro de téléphone avant l’arrivée de Gabriel. C’était le genre de petits défis que Naël aimait bien se donner. Ça ne servait strictement à rien d’autre que de flatter son égo, car il n’allait sûrement pas téléphoner à cette serveuse. Une fois que son ami allait montrer le bout de son nez, Nana allait sûrement oublier cette femme comme il oubliait rapidement toutes celles qui étaient entrée dans sa vie. Il n’avait jamais eu de véritable relation et il n’en aurait sûrement jamais. Il refusait de s’attacher. Il ne pouvait pas se le permettre avec son boulot. Même si avoir une partenaire ne serait pas désagréable. Sauf que pour ça, il fallait faire confiance et Nath’ avait énormément de mal à l’accorder. Même lui n’était pas nécessairement de confiance. Parfois l’appât du gain était tellement élevé qu’il serait prêt à trahir n’importe qui pour quelques millions supplémentaires. Ce n’était même pas qu’il avait besoin de cet argent, c’était encore une manière de flatter son égo. « J’espère que tu sauras te faire pardonner. » rétorqua simplement l’américain avec un doux sourire. Pari perdu. Gab’ était arrivé plus vite que prévu mettant fin à son petit jeu de charme avec la serveuse qui retourna à ses tâches. « Ouais… Mais je crois qu’elle est prise. » dit-il sans détacher son regard de la femme. « Elle ne doit pas avoir le droit de porter de bijoux dans le cadre de son travail, mais elle a le réflexe d’aller toucher constamment son annulaire gauche. » Avec les années, Nathan avait appris à analyser le langage corporel. Il avait également appris à l’utiliser à son avantage de manière à berner les gens au besoin.

Le brun parla ensuite brièvement de son faux voyage à Paris. Il aurait très bien pu parler de l’Italie, Gabriel n’aurait sûrement eu aucun doute, mais peu importe. Il était toujours extrêmement prudent. Ce n’était pas pour rien qu’il voyageait toujours avec une identité différente et sans bagage en soute. Il devenait plus difficile à suivre. D’un simple signe de la tête, Nathan confirma les paroles de son ami. Paris était une très belle ville et il allait devoir y retourner prochainement. Ça lui manquait. « En effet, l’important c’est les affaires. C’est ce qui permet de manger à la fin de mois. » Toujours ce même ton un petit peu taquin, mais pas moqueur. Nath’ était quelqu’un de joueur dans la vie. Il avait tout du genre d’homme qui ne se prenait pas la tête. « Tu payes la première tournée ? Je vais me laisser tenter par une bouteille de vin hors de prix alors. » répondit l’américain avant de prendre la carte pour la regarder. Il opta plutôt pour un cocktail à base de whisky. « Merci mon vieux. » dit le brun une fois la serveuse repartit avec leur commande. Ce fut plutôt rapidement et les deux hommes furent servis. Naël trinqua avec son ami. « À la nôtre ! » Il sourit et prit une longue gorgée de son verre avant de grimacer légèrement. « Whisky bas-de-gamme. C’est bien dommage au prix qu’ils le vendent ! » râla-t-il avant de rire légèrement. Naël était habitué aux produits de luxe. Il avait beaucoup de mal avec ce qu’ils servaient dans les cafés comme celui-ci. « Ta bière est bonne au moins ? »